Les leviers pour stocker du carbone en viticulture
Si supprimer les émissions de gaz à effet de serre (GES) issus de nos activités est impossible, nous pouvons cependant les compenser en stockant du carbone. Cette séquestration est permise principalement par les végétaux et par les sols, qui constituent ainsi des puits de carbone et contribuent à la fois à l’atténuation et à l’adaptation au changement climatique. Les secteurs agricole, viticole et forestier jouent un rôle primordial dans la compensation dans le cadre de l’objectif de neutralité carbone en 2050. En viticulture en particulier, il existe plusieurs manières de stocker du carbone.
Une première manière de stocker du carbone est de couvrir le sol, notamment sur les inter-rangs. Cette solution a été abordée dans un précédent article ➡️https://cerfrancebfc.cerfrance.fr/pages/stocker-du-carbone-en-viticulture-en-couvrant-ses-inter-rangs.
D’autres leviers peuvent être proposés pour aller dans ce sens que nous allons détailler ci-dessous.
La fertilisation organique
Tout d’abord, les engrais organiques sont à privilégier pour favoriser le stockage de carbone dans le sol. Il est par exemple possible de restituer de la biomasse végétale au sol (bois de taille par exemple), ou encore de lui apporter des amendements organiques de type fumier ou compost s’il est possible de s’en procurer à proximité. Selon la teneur initiale en carbone du sol, le stockage permis par la matière organique (MO) est différent.
Selon l’IFV, « l’épandage de 4,5 tonnes d’amendements organiques par hectare pendant 4 ans permet d’augmenter le stock de carbone de 4 pour 1000 dans une parcelle présentant une teneur initiale de 1,7 % de MO. Dans une parcelle dont le sol était initialement plus pauvre en MO, l’augmentation du stockage du carbone atteint même les 4 % »[1].
[1] Source : BIVB, Les leviers mobilisables pour réduire son empreinte carbone, février 2023
Le pâturage hivernal
Faire pâturer les parcelles de vigne par des brebis présente de nombreux avantages :
- Cela permet de réduire les opérations d’entretien des inter-rangs, et ainsi d’économiser du temps et du carburant, sans générer de dégâts sur les pieds de vigne (selon une étude, les brebis consommeraient l’herbe jusqu’au pied des vignes, les feuilles mortes sur les branches et les restes de rafles).
- L'apport de fertilisation organique par les selles des brebis est indéniable, bien qu’il ne soit pas quantifié à ce jour.
- Le pâturage permet d’améliorer la composition de la flore en augmentant la proportion de légumineuses.
- Cette pratique n’engendrerait pas de tassement du sol.
Ainsi, le pâturage est avantageux à la fois pour le viticulteur et pour l’éleveur, qui bénéficie d’une nouvelle source d’alimentation pour ses brebis.
Cependant, des précautions sont à prendre. Il est recommandé d’adapter le chargement et la durée de pâturage à la ressource disponible. D’après le projet Brebis_Link, « il est souvent possible de réaliser deux passages des brebis au cours de l’hiver. Un hectare de vignes peut fournir 500 à 700 journées de pâturage brebis par an sur sols profonds, ou 300 journées de pâturage brebis par an sur sols peu profonds. »[1]. De plus, il est préférable d’éviter les brebis avec des cornes dans les vignes étroites et d’accoutumer les animaux à la clôture électrique pour qu’ils la respectent. Il est également conseillé d’aménager des espaces en bout de rang pour permettre aux animaux de se coucher.
Enfin, bien qu’à ce jour aucun effet direct du cuivre sur les animaux n’ait été remonté, il est recommandé de rester prudent et d’adapter les périodes de pâturage aux traitements de la vigne. De plus, les variétés fourragères sont à privilégier à celles utilisées pour l’engazonnement, qui peuvent produire des mycotoxines.
[1] Source : Projet Brebis_Link, Fiche 6 : Des brebis dans les vignes, juillet 2020
La vitiforesterie
La vitiforesterie consiste à associer des plantations sylvicoles à la production viticole. Elle présente de nombreux bénéfices à la fois pour la culture et pour les sols : lutte contre l’érosion, préservation de l’humidité et des éléments nutritifs du sol, amélioration du taux de MO du sol, protection de la vigne contre les aléas climatiques, stockage de carbone, etc. Elle constitue donc une réponse à la problématique du changement climatique en viticulture. De plus, elle permet un gain technico-économique par la réduction des pertes d’azote par lixiviation, la limitation de la dérive aérienne des produits phytosanitaires et la régulation des populations de ravageurs par la biodiversité entretenue. Enfin, elle apporte une plus-value à l’image de l’exploitation par la présence de l’arbre, qui pourrait permettre une valorisation commerciale et/ou le développement de l’œnotourisme.
Cependant, cette pratique reste encore peu répandue par crainte de phénomènes de concurrence avec la vigne (eau, azote, lumière). La maîtrise de cette compétition peut passer par la gestion des arbres (régulation du système aérien, de l’ombrage et du développement racinaire), par un entretien du sol adapté (par exemple, par un couvert de légumineuses sur l’inter-rang) ou par des techniques viticoles classiques (fertilisation ciblée, irrigation).
La vitiforesterie en pratique
Les parcelles de vitiforesterie peuvent prendre différentes formes : arbres individuels plantés au sein d’un rang de vigne, rangs d’arbres intercalés entre les rangs de vigne, haies arbustives en bordure de parcelles… Les essences sont choisies selon les objectifs du viticulteur et en général plantées en mélange pour favoriser la biodiversité. Il est recommandé de choisir des espèces rustiques avec un feuillage peu épais pour limiter la concurrence pour la lumière. Une certaine distance doit également être maintenue entre arbres et vigne et entre les arbres entre eux.
Combien coûte la vitiforesterie ?
Il faut compter 18 € HT pour la plantation et la protection d’un arbre intra-parcellaire.
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