Stocker du carbone en viticulture en couvrant ses inter-rangs
Si supprimer totalement les émissions de gaz à effet de serre (GES) issues de nos activités est impossible, nous pouvons cependant les compenser en stockant du carbone. Cette séquestration est permise principalement par les végétaux et par les sols, qui constituent ainsi des puits de carbone et contribuent à la fois à l’atténuation et à l’adaptation au changement climatique.
Les secteurs agricole, viticole et forestier jouent un rôle primordial dans la compensation dans le cadre de l’objectif de neutralité carbone en 2050. En viticulture en particulier, il existe plusieurs manières de stocker du carbone. Dans cet article, nous vous présenterons le stockage permis par la couverture des sols.
Il existe divers types de couverture des inter-rangs : permanente ou temporaire, semée ou spontanée, engrais vert, etc. L’étude des sols viticoles a mis en évidence que la vigne comme les couverts ont une biomasse racinaire qui explore majoritairement les horizons superficiels, quelles que soient les espèces.
Ce constat est à double tranchant :
- À la fois un atout, puisque la présence des couverts permet d’améliorer la structure et la vie biologique du sol, de protéger les parcelles du ruissellement et de l’érosion, et de favoriser l’accès de la vigne à l’oxygène, à l’eau et aux éléments nutritifs ;
- Mais aussi une contrainte, car cela peut engendrer un coût (à la fois financier et en temps de travail) et de la concurrence pour ces mêmes éléments nutritifs. Cette concurrence potentielle est le principal frein à l’enherbement pour les viticulteurs, puisqu’elle peut entraîner une réduction de la vigueur et du rendement de la vigne. Cependant, il est possible de maîtriser ce risque en jouant sur plusieurs facteurs.
Quelle(s) espèce(s) choisir pour enherber ses inter-rangs ?
Le choix des espèces se fait en fonction des objectifs visés :
- Les moins concurrentielles seraient les espèces annuelles (graminées et légumineuses), puisque leur cycle se termine au printemps et qu’elles ne sont pas présentes en saison estivale, où l’enjeu est le plus important. On recommande généralement de semer un mélange (5 à 7 espèces), contenant au moins 50% de légumineuses, afin de produire plus de biomasse, de mieux structurer le sol et d’avoir une couverture plus résistante aux aléas climatiques.
- À noter que l’enherbement spontané peut être une solution intéressante puisque les espèces sont, par définition, adaptées au sol et au climat.
- En ce qui concerne les couvertures permanentes, elles donnent l’avantage de ne plus avoir besoin de travailler le sol sur les inter-rangs, mais elles pourraient engendrer plus de concurrence hydrique et azotée que les couvertures temporaires.
Quand faut-il semer son couvert végétal ?
Selon certaines études, il serait préférable de semer autour de fin août-début septembre pour bénéficier des restes de chaleur estivale et des pluies d’automne. Cela permettrait au couvert d’être bien en place avant le début de l’hiver, où les basses températures et la réduction de l’ensoleillement limitent son développement.
Quel bénéfice d’un point de vue carbone ?
« Les experts de l’Inrae ont estimé en 2021 que le stockage additionnel permis par l’enherbement permanent est de 246 kgC/ha en moyenne (et très variable en fonction de la situation initiale des parcelles) et celui induit par l’enherbement d’hiver de 159 kgC/ha. » (Source : IFV).
Qu’en est-il de la restitution des sarments au sol et des mulchs ?
Restituer les sarments au sol est bénéfique sur deux plans :
- D’une part, cela permet d’enrichir le sol en humus, de réduire les pertes de matière organique par minéralisation et par conséquent de maintenir la fertilité des sols.
- D’autre part, en les restituant au sol, on réduit les exportations de la vigne et donc le besoin de fertilisation pour entretenir les réserves minérales du sol. De cette manière, cette pratique permet de conserver une bonne qualité de sol et de limiter les quantités d’intrants à apporter pour la croissance de la vigne.
En termes de faisabilité technico-économique : les sarments sont en général broyés, ce qui limite en même temps le besoin d’investissement matériel et donc les coûts associés (achat d’un broyeur = 2 000 à 8 000€ HT). Il est également possible de composter les sarments afin de limiter la présence éventuelle de champignons responsables des maladies du bois. Cependant, le coût associé est alors bien plus conséquent (mise en place d’un atelier de compostage : 15 000 à 30 000€ HT au minimum).
Enfin, le mulch est une couche protectrice à la surface du sol, en général composée de paillis ou de résidus de culture. Sa présence permet de réduire de manière conséquente l’évaporation du sol et les variations thermiques. De cette manière, il contribue à la fertilité du sol (enrichissement en matière organique), à la conservation de l’eau du sol (en améliorant l’infiltration) et à la réduction de l’érosion. En revanche, il convient de mettre en place un mulch sur un sol encore humide pour bénéficier de ses bienfaits, il n’aura aucun effet sur l’évaporation de l’eau sur un sol sec.
Vous souhaitez faire le diagnostic carbone de votre exploitation ? N’hésitez pas à nous contacter à l’adresse conseil@bfc.cerfrance.fr