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chef d'entreprise devant choisir sa route

Remettre l’entreprise à sa juste place dans sa vie : une nécessité pour le dirigeant mais aussi pour l’entreprise

Quand l’entreprise prend toute la place, c’est l’équilibre personnel, familial, social et finalement la pérennité de l’entreprise elle-même qui vacille. Et si remettre l’entreprise à sa juste place était l’acte de gestion le plus stratégique ?

De nombreux dirigeants d’entreprise, portés par la passion, l’engagement ou l’urgence, finissent par faire de leur activité professionnelle le centre de gravité de leur vie. L’entreprise prend toute la place : dans l’emploi du temps, dans les échanges quotidiens, dans les pensées, et même dans les rares moments de pause. Cette présence permanente devient la norme, jusqu’au jour où l’on réalise que tout le reste s’est effacé : la vie sociale, la vie de famille, la vie personnelle.

Ce déséquilibre n’est pas sans conséquences. Il finit par impacter la santé du dirigeant, voire l’entreprise elle-même.

Quand l’entreprise devient toute la vie

La ligne est fine entre implication et obsession. Lorsqu'on crée ou dirige une entreprise, l’envie de réussir, la peur de lâcher prise, ou l’illusion de la maîtrise peuvent pousser à un engagement sans limites.

Il y a les raisons que l’on se donne : "je n’ai pas le choix", "c’est temporaire, ça ira mieux après", "personne ne peut le faire à ma place". Et puis il y a les vraies raisons, celles qu’on a du mal à reconnaître : le besoin de reconnaissance, la difficulté à faire confiance, la peur de l’échec ou du vide, le besoin de tout contrôler.

Le résultat est le même : l’entreprise prend toute la place. Plus de temps pour les proches, pour soi, pour se reconnecter à ce qui fait sens en dehors du travail. Le repos devient culpabilisant. La maison devient une annexe du bureau, les week-ends se remplissent de ce qui n’a pas pu être casé la semaine ou le soir, et les vacances, si elles ne sont pas supprimées, deviennent des plages de gestion des urgences à distance.

Les conséquences d’une surcharge normalisée

Ce mode de fonctionnement finit par se retourner contre le dirigeant, mais aussi contre l’entreprise.

  1. L’usure mentale et physique : stress chronique, irritabilité, troubles du sommeil, isolement, fatigue accumulée, dégradation de la santé. Le corps parle quand l’esprit ne s’écoute plus et souvent quand les limites ont été dépassées.
  2. La perte de recul : à force d’avoir "la tête dans le guidon", la vision à moyen et long terme s’altère. Les priorités se confondent, les décisions deviennent réactives et plus proactives, l’analyse perd en pertinence. La gestion du quotidien prend toute la place au détriment de l’anticipation et la prospection.
  3. L’appauvrissement relationnel : les relations personnelles s’étiolent, parfois jusqu’à la rupture. L’isolement du dirigeant grandit, aggravant la perte de recul et l’usure physique et mentale. 
  4. Le risque de mésentente entre associés : l’usure physique et mentale, la perte de recul et l’isolement peut générer de la mésentente dans les équipes d’associés. 
  5. Le risque pour l’entreprise : un dirigeant épuisé, moins lucide, une équipe d’associés en tension devient une fragilité pour sa propre structure.

Quand le capitaine s’épuise, c’est tout le navire qui est en danger. Que se passe-t-il si le dirigeant, sur qui tout repose, flanche ? 
 

Reprendre sa place, redonner une place

Remettre l’entreprise à sa juste place dans sa vie ne signifie pas lâcher prise sur ses responsabilités. Cela veut dire redonner de l’espace, du temps au reste, soit sa vie sociale, sa vie familiale et sa vie personnelle. C’est la personne qui définit son rôle de chef d’entreprise et non l’inverse.

1. Accepter que l’on est un maillon

Certes le plus important de l’entreprise, mais pas l’unique pilier. S’entourer, déléguer, faire confiance : autant de leviers pour alléger la charge de travail. Il s’agit moins de compétence que de posture. Laisser une place aux autres permet de se recentrer sur sa vraie valeur ajoutée pour soi, pour les autres et au final, pour l’entreprise.

2. Réapprendre à se déconnecter

Cela peut commencer par des plages horaires préservées : soirées sans bureau, week-end en dehors de l’entreprise et peut être des vacances en fonction de ce que je peux accepter de m’accorder en toute sérénité. Cela passe aussi par la création de rituels : temps de sport, de marche, d’activité artistique, apéro entre amis. Retrouver des activités sans objectif de performance et surtout pour soi.

3. S’appuyer sur l’extérieur

Coachs, pairs, mentors : autant de ressources pour comprendre où la personne et le dirigeant en sont et trouver des moyens de sortir de l’isolement, ouvrir de nouvelles perspectives et prendre du recul. Le dialogue avec des interlocuteurs neutres permet d’identifier ce que le quotidien empêche de voir.

4. Travailler sur le sens

Pourquoi cette entreprise ? Pour quoi ? Revenir à l’intention initiale, aux valeurs, aux motivations profondes. Une entreprise n’est pas une fin, c’est un moyen. Définir son rôle dans une vie plus large permet de remettre les priorités en ordre.
Parce que, au final, l’entreprise prend la place que je lui donne.

Prendre soin de soi, c’est prendre soin de l’entreprise

Un dirigeant en bonne santé, équilibré, entouré, clairvoyant, est une force pour l’entreprise. Inversement, un dirigeant en déséquilibre met en danger l’ensemble de la structure.

Prendre soin de soi n’empêche pas que, temporairement, il y ait une surcharge de travail. Mais cela doit être réellement temporaire, donc à durée définie. Il est donc nécessaire d’avoir une organisation équilibrée de sa vie en temps normal. Et pour cela, il faut être conscient et convaincu qu’être dirigeant, ce n’est pas toute sa vie, juste un rôle dans sa vie.

Il ne s’agit pas d’une posture de confort, mais d’une stratégie de pérennité : l’anticipation, l’analyse, la vision à long terme ne peuvent exister que si l’esprit a de l’espace. La créativité naît dans le « vide », pas dans la saturation. La prise de recul naît de la pause, pas de l’agitation.

Quelques pistes concrètes

  1. Faire un diagnostic personnel de son emploi du temps, de sa gestion du temps :

    quelles plages sont consacrées à autre chose que l’entreprise ?

  2. Identifier les tâches :

    que l’on pourrait arrêter car devenues inutiles, transmettre parce que délégables, automatiser ou simplifier parce que des outils permettent de le faire.

  3. Organiser son temps ;

    zapper d’une activité à l’autre fait perdre du temps, savoir faire des pauses pour retrouver de l’énergie, etc.

  4. Fixer des limites :

    horaires de travail, temps pour soi, temps pour les proches, une entreprise qui reste dans les locaux de l’entreprise.

  5. Se faire accompagner :

    pour avoir un partenaire de réflexion neutre et définir ce qui convient à soi, à son entourage, à son entreprise.

  6. Se reconnecter :

    à ses envies personnelles, ses besoins, ses valeurs, ce qui met en énergie, indépendamment du rôle de dirigeant.

  7. Planifier des temps de réflexion stratégique réguliers :

    en dehors de la pression du quotidien.

Pour conclure

Redonner à l’entreprise sa juste place dans sa vie de dirigeant n’est pas un luxe. C’est une nécessité vitale, autant pour la personne qui porte la direction de l’entreprise que pour l’organisation qu’elle dirige au quotidien. Une entreprise durable repose sur un dirigeant qui entretient un équilibre vie privée – vie professionnelle. Prendre soin de soi, c’est investir dans sa réussite. Reprendre de la hauteur, c’est assurer l’avenir, garantir d’être en capacité de faire face aux aléas.

Et si remettre les choses à leur place était, finalement, l’acte de gestion de l’entreprise le plus lucide qui soit ?

catherine louat

Catherine Louat

Conseillère spécialisée en coaching des dirigeants

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