Transmission, le saut de génération : opportunités, contraintes, outils
Si l’allongement de l’espérance de vie est positif, la conséquence est que les personnes héritent de plus en plus tard.
L’âge moyen des héritiers se situe autour de 50 ans. Il était légèrement supérieur dans les années 80 et même de 30 ans en 1900.
Au-delà de ces raisons démographiques et de ces données statistiques, de plus en plus de personnes manifestent l’objectif d’aider leurs enfants (ou d’autres personnes) au moment où ils en ont besoin. Plus l’âge auquel la personne hérite est important, moins elle en aura potentiellement besoin. À l’inverse, un patrimoine reçu plus tôt, même de moindre ampleur, peut faire une réelle différence pour amorcer des projets et se lancer dans la vie (apport pour acheter un bien immobilier, reprendre une entreprise…).
Dans ce contexte, la réflexion de réaliser un saut de génération se pose de plus en plus fréquemment. Différentes possibilités existent pour le pratiquer.
1 - Renoncer dans le cadre d’une succession
Il est possible de renoncer à une succession, par exemple au profit de ses enfants. Dans ce cas, ce sont eux qui héritent à la place de leur parent renonçant. Sur le plan fiscal, il se partage l’abattement de ce dernier et bénéficie du barème applicable à ce dernier. Par exemple, si un père renonce au profit de ses deux enfants, l’abattement de 100 000 € sera partagé (50 000 € chacun).
Bien que juridiquement possible, la renonciation à une succession est relativement rare en pratique car :
- Parfois complexe à mettre en œuvre. Cela est notamment le cas lorsque la succession concerne le second parent, puisque dans ce cas le parent a des droits qu’il tient de la succession du premier parent et les enfants ont des droits reçus dans le cadre de la renonciation. Cela peut entraîner des conséquences non souhaitées en aboutissant à des situations d’indivision.
- Globale. Renoncer est engageant, car il faut être certain de ne pas avoir besoin de la totalité des biens composant la succession. Il est possible que seuls certains biens soient légués par les grands-parents aux petits-enfants par voie de testament, mais cela implique d’avoir eu la discussion de leur vivant et qu’ils soient d’accord.
2 - Renoncer dans le cadre d’une assurance vie
L’assurance vie est traitée hors succession. C’est la clause bénéficiaire qui détermine le devenir des capitaux au dénouement du contrat lors du décès du souscripteur. Celle-ci peut permettre au bénéficiaire de premier rang de renoncer au profit des bénéficiaires suivants. Il faut pour cela que la clause soit rédigée en conséquence. Certaines clauses (notamment de rédaction ancienne) prévoient bien la renonciation en cas de prédécès du bénéficiaire de premier rang, mais pas en cas de renonciation volontaire. Or, celle-ci peut être souhaitée pour basculer des capitaux directement aux bénéficiaires suivants.
L’opération peut être très intéressante sur le plan fiscal, particulièrement quand le premier bénéficiaire a plus de 70 ans et qu’il ne pourrait plus verser les fonds en assurance vie avec la fiscalité successorale favorable.
La situation est fréquente entre époux. Par exemple, l’époux décède avec un contrat d’un encours de 200 000 € désignant le conjoint bénéficiaire de 1ᵉʳ rang. Si les sommes sont replacées en assurance vie après 70 ans, les capitaux seront intégrés dans la succession (sauf 30 500 €) et taxable au barème des droits de succession (environ 35 000 € en ligne directe parent/enfant à raison de 20 % de taux). Si l’époux survivant estime qu’il n’a pas besoin des capitaux pour ses besoins, il peut donc renoncer (à condition que la clause soit rédigée de façon à le permettre). Si par exemple ce sont ses deux enfants qui récupèrent les capitaux, il n’y aura pas de taxation.
3 - Recourir aux donations
Un grand-parent peut tout à fait donner un bien ou une somme d’argent à ses petits-enfants (ou un oncle à ses neveux…). La différence par rapport aux possibilités précédentes est que les effets se produisent du vivant du donateur et non de façon différée à son décès.
L’attention doit à la fois se porter sur le côté juridique et fiscal.
Sur le plan fiscal, chaque grand-parent bénéficie envers chaque petit-enfant d’un abattement de 31 865 € tous les 15 ans. Un abattement spécifique au don d’argent est applicable à condition que le grand-parent ait moins de 80 ans et que le petit-enfant soit majeur. Ainsi, chaque grand-parent peut donner tous les 15 ans jusqu’à 63 730 €, dont 31 865 € en numéraire et 31 865 € en biens libres (immobilier, foncier, numéraire…).
Sur le plan juridique, la donation réalisée au profit d’un petit-enfant s’impute par défaut sur la quotité disponible (= part d’héritage dont on peut disposer librement par opposition à la réserve héréditaire revenant obligatoirement aux héritiers réservataires). La part donnée aux petits-enfants vient donc réduire celle revenant aux enfants.
C’est notamment pour éviter cela, sécuriser les donations à la génération suivante pour les inciter que la donation-partage transgénérationnelle (obligatoirement notariée) a vu le jour il y a une quinzaine d’années. Elle évite les conséquences non souhaitées de l’imputation sur la quotité disponible, car la part reçue par les petits-enfants vient s’imputer sur la part de réserve de leur parent. Elle offre une grande souplesse, puisqu'elle permet de réunir des générations différentes autour d’une même opération.
Par exemple, un couple détient une maison de vacances au sein d’une SCI qu’il souhaite transmettre à ses 3 enfants. L’un d’entre eux préfère que ses enfants reçoivent directement les parts de la SCI à sa place, car il dispose déjà d’un patrimoine significatif à leur transmettre. Il décide donc de s’effacer au profit de ses enfants. En revanche, son frère et sa sœur, qui n’ont pas la même situation, décident de recevoir les parts de SCI. Cela est possible et le capital de la SCI sera réparti de la façon suivante :
L’opération peut être très intéressante lorsque l’on intègre l’économie sur la 2ème transmission puisque le père qui s’est effacé au profit de ses enfants n’aura pas à transmettre ces biens (économie de droits de donation/succession et de frais d’acte).
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